Pour la sauvegarde des canaux Freycinet de France
Conscient de la dégradation des conditions d’exploitation des opérateurs fluviaux sur le réseau Freycinet à petit gabarit, un collectif, à l’initiative de l’ANPEI (Association Nationale des Plaisanciers en Eaux Intérieures) a décidé d’interpeller les députés, sénateurs, présidents de région, etc. pour leur démontrer tout l’intérêt de ce réseau et demander son maintien pour des raisons tant économiques qu’écologiques.
Soutiennent l’initiative : : l’ANPEI, les Amis du Canal du Nivernais, Agir pour le fluvial, l’Entente des Canaux du Centre France, Fayolle Marine et Plaisance, Inland Waterways International, H2O, CroisiEurope, les Canalous, UPCM, Yacht Club Paris Bastille, Blanquart Yachting, Promofluvia, ADHF-F, Nicols, Canal Cruises, Locaboat, Europe Boat, DBA-The Barge Association, APPIF et Entreprises fluviales de France.
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Le vendredi 30 avril 2021, le ministère de la transition écologique et Voies navigables de France signaient le Contrat d’Objectifs et de Performance de l’établissement public pour les 10 prochaines années. Ce contrat résulte sans aucun doute d’une volonté de l’État de réduire la dépense publique. Grande est la crainte, que soient abandonnées les voies navigables de gabarit Freycinet pour concentrer le budget sur d’autres, en oubliant les liaisons entre les différents bassins qui sont pour nous essentielles.
STOP à la mort des canaux interbassins ! C’est un patrimoine à préserver pour demain.
Le réseau navigable intérieur français, le plus long d’Europe, est également le moins utilisé.
Avec 8 500 km de voies navigables qui se décompose en :
- 200 km de réseau au grand gabarit (bateaux jusqu’à 4400 tonnes de charge utile)
- 5 000 km de réseau au gabarit Freycinet (bateaux de 250 à 350 tonnes de charge utile)
- 1 000 km de canaux et rivières à gabarits divers utilisés majoritairement par la plaisance (Canaux Bretons, Canal du Midi, Canal du Nivernais) mais qui ont aussi un rôle à jouer dans le fret.
L’état actuel de la majorité des voies navigables Freycinet et petit gabarit est très dégradé.
L’envasement, phénomène pervers car il est à la fois cause et conséquence, entraîne une plus grande érosion des berges, dont la matière se retrouve au fond du canal, pour une accentuation du phénomène d’envasement. Canal et bateau Freycinet forment un couple indissociable qu’il faut absolument préserver, sous peine de grands déboires techniques et économiques. Malheureusement, avec le manque d’enfoncement, les conditions de navigation empirent pour les péniches de fret, les péniches-hôtels et les gros bateaux de plaisance. Leur trafic diminue de plus en plus. Sans leur passage, l’eau n’est plus troublée, les plantes aquatiques invasives bénéficient alors d’une grande luminosité et prolifèrent de manière anarchique, ralentissant le flux de l’eau et augmentant encore l’envasement.
La Loi sur l’Eau, en transposant de manière extrême les directives européennes sur l’eau en France, conduit la plupart du temps VNF à renoncer au dragage compte tenu de la complexité et du coût des travaux induits.
La navigation fluviale existe depuis la nuit des temps. L’aménagement systématique de la voie d’eau commence vraiment au XVIIème siècle. Certains ouvrages d’art fonctionnement encore aujourd’hui, mais par manque d’entretien ces dernières décennies, ceux-ci sont en mauvais état. Les écluses et ponts-canaux fuient. Les berges s’effondrent un peu partout. La navigation y est de plus en plus souvent interrompue, et de plus en plus souvent, pour de longues périodes.
Si le gabarit Freycinet semble un nain comparé aux millions de tonnes transportées par le Grand gabarit, c’est le seul qui permet de relier les différents bassins du Rhône, de la Seine, du Rhin, de l’Escaut, …. Un bateau de type Freycinet transporte silencieusement et en générant beaucoup moins de pollution, autant de fret que dix semi-remorques, avec une accidentologie quasi nulle.
On oppose souvent la lenteur du transport fluvial à la vitesse du camion. Mais c’est la fiabilité du temps de parcours qui compte pour le transport de marchandises non périssables. Sur un réseau en bon état, les bateaux sont imbattables de ce point de vue, il suffit aux chargeurs de prévoir et de tenir compte de la durée du trajet. C’est alors le bateau qui devient le plus rentable économiquement et surtout le plus respectueux des impératifs de préservation de l’environnement. Aujourd’hui où le combat contre les émissions de gaz à effet de serre est devenu une cause internationale majeure, la navigation redevient une alternative pour le fret. Cette infrastructure historique en désuétude, risque bien de redevenir indispensable demain, avec le redéploiement d’un système de transport plus économe en énergie, et plus écologique.
Les voies navigables sont aussi un vecteur pour le tourisme. Transport de passagers, location de bateaux, péniche-hôtel et navigation de plaisance jouent un rôle économique important dans des régions éloignées des grands centres urbanisés. Les voies navigables offrent, particulièrement à la clientèle étrangère, une magnifique vitrine de la France et de son art de vivre. Très liées au maillage des canaux et rivières on retrouve aussi les activités fluvestres qui regroupent le cyclotourisme, la randonnée pédestre, les activités nautiques mais aussi la pêche.
Les métiers d’accueil et d’hébergement, ainsi que les commerces locaux, parviennent à survivre toute l’année pour le bénéfice des populations locales, grâce à l’apport de clientèle de la belle saison. En plus, autour de ces activités, un grand nombre de professions dédiées à la navigation se développent : chantiers navals, entreprises de location de bateaux, infrastructures portuaires, … et génèrent de l’emploi.
Les usagers de la voie d’eau qui passent les frontières et vont naviguer en Belgique, aux Pays-Bas, en Allemagne, sur des voies fluviales draguées et entretenues, où les plantes invasives sont contenues et où il est aisé de remplir son réservoir d’eau potable ou de déposer ses déchets ménagers, … se demandent pourquoi la France n’est pas capable d’offrir les mêmes prestations alors qu’il existe déjà un magnifique patrimoine fluvial, souvent envié.
Nous demandons qu’une attention particulière soit accordée au transport de marchandises sur le réseau Freycinet et sur tous les canaux plus « petits » où cela est possible parce que ce mode de transport représente une véritable alternative économique et surtout environnementale, mais aussi parce que les bateaux de ce gabarit sont absolument indispensables à l’entretien des canaux. Dans le but principal de voir le réseau fluvial participer à la réduction de l’empreinte carbone de la France, nous vous sollicitons, Monsieur le député, de veiller à ce que VNF reçoive tout le soutien nécessaire afin de conserver cette infrastructure essentielle et de la restaurer en veillant que l’enfoncement d’origine soit maintenu ou rétabli. Cette régénération est possible, bien moins coûteuse et plus pérenne que celle des routes démolies par le nombre grandissant de camions. Elle génèrera ensuite des retombées économiques importantes sur les territoires traversés.
Nous comptons également sur vous pour demander une modification de la loi sur l’eau afin de sortir les canaux de cette contrainte pour faciliter les chantiers de dragage sur tous les canaux. Alors les bateaux de commerce, péniches-hôtels, bateaux à passagers ou de location, et plaisanciers, de plus en plus nombreux, reviendront « fertiliser » ces territoires de la France profonde, souvent en déshérence, pour le plus grand bonheur de leurs habitants, et aussi pour l’intérêt bien compris de tous.
Nous demandons que chaque kilomètre de canal ou de rivière canalisée soit entretenu, afin de préserver ce patrimoine culturel et vivant, mais aussi pour ne pas obérer l’avenir.
Agissons tous ensemble pour que toutes les voies navigables françaises retrouvent leurs activités et leur splendeur.