Rapport annuel de l’observation du marché de la navigation intérieure en Europe (édition 2021)

Le nouveau rapport annuel sur la navigation intérieure européenne réalisé en partenariat avec la Commission Européenne par le Secrétariat de la Commission centrale pour la navigation du Rhin (CCNR), vient d’être publié. Ce rapport fournit un aperçu exhaustif de la situation du marché et des développements de la navigation intérieure en Europe au cours de l’année 2020. Vous trouverez ci-dessous une synthèses des principales observations.

L’année 2020 a été marquée par une crise économique hors du commun. Les fermetures, les réglementations relatives à la mobilité individuelle et la distanciation sociale qui ont marqué le comportement économique des sociétés ont été d’une ampleur sans précédent. Le PIB réel(1) s’est contracté de 6 % dans l’UE en 2020, ce qui représente une contraction supérieure à celle affichée pendant la crise financière de 2009 (-4 %).

L’impact de la pandémie sur l’activité économique a été ressenti par le secteur des transports en général et par la navigation intérieure en particulier. Le transport de marchandises par voie navigable a cependant mieux résisté que dans les situations de crise précédentes, très probablement en raison d’une réduction inégale de l’activité entre les secteurs économiques(2) : la diminution en pourcentage des marchandises transportées sur le Rhin était de 8,4 % en 2020, contre 18,3 % en 2009.

Un exemple de cette résilience est le transport de conteneurs, qui s’élevait à 15 millions de tonnes sur le Rhin en 2020, ce qui ne représentait qu’une légère différence par rapport à la valeur relevée en 2019 (15,2 millions de tonnes). Or, tous les segments de fret liés à la production d’acier (soit 25 % du transport rhénan) ont connu des baisses non négligeables (minerai de fer : -14,2 % ; métaux : -14,6 %). Le transport de sables, pierres et graviers a été réduit de 8,4 %. Les volumes de produits agricoles transportés, qui constituent une exception positive, ont augmenté sur le Rhin en 2020 (+10,7 %).

La résilience du transport fluvial pendant la pandémie ressort non seulement de l’observation du transport rhénan, mais aussi de celle du transport fluvial dans les grands ports maritimes européens dont l’arrière-pays est intensivement lié à la région rhénane :

  • Dans le port de Rotterdam, le trafic fluvial a atteint 149,7 millions de tonnes (-2 %) ;
  • Dans le port d’Anvers, le trafic fluvial était presque stable par rapport à 2019 (101,0 millions de tonnes en 2020, et 101,3 millions de tonnes en 2019) ;
  • Dans le North Sea Port (Gand, Terneuzen, Borsele, Vlissingen), le trafic fluvial était de 55,0 millions de tonnes, ce qui représente une baisse limitée de 6,0 %.

L’évolution des prix du transport ou des taux de fret en 2020 a globalement suivi la demande de transport : après avoir accusé une baisse au premier semestre, les taux de fret applicables aux cargaisons sèches sur le Rhin se sont redressés à l’approche du second semestre. En ce qui concerne les taux de fret applicables aux cargaisons liquides, la réduction des prix du pétrole en mars a déclenché une reprise temporaire de la demande de transport en avril et en mai. Il s’en est suivi une hausse temporaire des taux de fret pour le gasoil et ses composants. Toutefois, lorsque cet effet s’est estompé, les taux de fret se sont établis à des niveaux beaucoup plus bas au cours du second semestre.

En ce qui concerne le transport de marchandises, les perspectives sont globalement orientées vers une reprise pour la période 2021-2024, en raison d’une augmentation attendue de la production industrielle sur les principaux marchés émetteurs de la navigation intérieure (production sidérurgique et chimique, activité de raffinage et demande de produits pétroliers, activité de construction). L’activité économique devrait cependant rester en-dessous des niveaux atteints à la fin de l’année 2019, et ce jusqu’en 2022.

En raison des conséquences de la pandémie (règles de distanciation, restrictions des déplacements, etc.), le transport de passagers a été complètement arrêté en mars 2020 et a fait l’objet de fortes restrictions tout au long de l’année 2020.

Sur le Rhin, le nombre de bateaux de croisière ayant franchi l’écluse d’Iffezheim est passé de 2 929 en 2019 à 534 en 2020 (-82 %). Sur d’autres fleuves européens où le trafic de croisière est élevé, la baisse a également été extrême : sur le Danube, à la frontière germano-autrichienne, les chiffres sont tombés de 3 668 bateaux de croisière à 324 (-91 %). Sur la Moselle, le nombre de bateaux ayant franchi l’écluse de Coblence est passé de 1 536 à 469 (-70 %).

De même, le segment des passagers d’excursions journalières a fortement régressé en raison de la crise en 2020. À Strasbourg, par exemple, le nombre de passagers a chuté de près de 80 % en 2020 par rapport à 2019.

En ce qui concerne les perspectives pour le transport de passagers en 2021 et au-delà, trois grands scénarios peuvent être envisagés :

  • 1. Levée complète de la quarantaine dans tous les pays ;
  • 2. Assouplissement ou maintien des mesures de quarantaine dans certains pays seulement ;
  • 3. Maintien des restrictions en ce qui concerne le transport de passagers.

Le scénario qui se concrétisera dépendra principalement de la manière dont se présentera la situation sanitaire liée à la pandémie à la fin de l’année 2021 et en 2022. Même en cas de levée complète des restrictions, il est probable que la pandémie continuera d’avoir un impact sur les croisières fluviales, notamment en raison du degré élevé d’aversion au risque des principaux groupes de clients étrangers.

L’intégralité du rapport peut être téléchargé en pdf en version française, allemande, néerlandaise ou anglaise ou consulté directement en ligne sur : www.inland-navigation-market.org.


(1) Le produit intérieur brut réel (PIB réel) est une mesure corrigée de l’inflation, qui reflète la valeur de tous les biens et services produits par une économie au cours d’une année donnée (exprimée en prix de l’année de référence).

(2) La crise de 2009 était une crise économique plus « classique », avec des pertes énormes pour l’activité industrielle, tandis que la crise de 2020 était davantage orientée vers les pertes subies dans le secteur des services et du tourisme, avec un impact moindre sur le transport de marchandises.